Le Comité Éthique et Sport : un nouvel avenir…
Véronique LEBAR, présidente du Comité Éthique et Sport depuis 2013, nous explique l’importance de cette association pour la protection du sportif. Médecin de formation et ancienne directrice de la cellule médicale recherche prévention au sein de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD), elle s’est rendue compte que point du vue éthique, il n’existait pas de propositions concrètes élaborées spécifiquement pour le sportif. C’est pourquoi elle a décidé de participer à des réflexions concernant leur avenir.
Depuis sa création en 2013, le Comité Éthique et Sport permet d’assurer une protection complète pour le sportif. L’éthique est une notion en constante évolution et ce comité tente de s’y adapter le mieux possible. L’éthique renvoie à l’existence « de valeurs humaines générales et à l’idéal d’une adéquation entre vertus de l’individu et valeurs d’une société ».
Les bienfaits du sport sont incontestables. Au-delà de l’aspect santé, il permet de rassembler les individus lors de rencontres sportives. Cependant, le sport a ses parts d’ombres et le sportif en est la principale victime. Dans le sport professionnel, mais aussi pour les amateurs, de nombreux combats sont menés au quotidien. À travers ces différents défis, comme le dopage ou la maltraitance, le sportif en lui-même est mis au second plan. Par conséquent, quatre projets principaux sont portés par le Comité Éthique et Sport qui sont : la lutte contre le dopage, la lutte contre les maltraitances, la mixité et le sponsoring responsable. L’objectif unique de ce comité est de faire des propositions concrètes sur certaines déviances dans le sport afin de protéger, accompagner, ou encore donner les moyens au sportif de se défendre.
Selon la Charte Olympique, les principales valeurs du sport sont l’amitié, l’excellence et le respect. Trois valeurs que doit à tout prix prôner un sportif. Se dépasser, tout en instaurant une amitié et du respect entre les différentes cultures, telle est la devise principale du sport au niveau international. Néanmoins, les quatre combats du Comité Ethique et sportif révèlent que, dans chacun de ces domaines, la sanction du sportif semble être la principale solution, sans que lui soit laissée la possibilité de se défendre de la manière la plus juste.
Ainsi, ce Comité apporte son soutien aux sportifs sur les différentes alternatives possibles afin de mener ces combats.
L’utilité de la prévention dans la lutte contre le dopage
La lutte contre le dopage est apparue suite à l’affaire Festina, en lien avec le Tour de France de 1998. Le médecin de l’équipe Festina avait été contrôlé par la douane française, qui aurait découvert dans sa voiture plus de quatre cents flacons de produits dopants et stupéfiants, 120 capsules d’amphétamines et d’autres produits relatifs au dopage. Face à une telle évidence, plusieurs personnes de l’équipe ont fini par avouer l’existence d’un dopage organisé au sein de l’équipe. Le dopage ne pouvait donc plus être toléré au sein des compétitions sportives. La concurrence n’était plus assurée et il fallait y remédier.
En outre, l’objectif principal est de sanctionner les sportifs qui se dopent afin de les dissuader de recommencer. Le régime légal est donc assez strict et se base uniquement sur la présence d’une substance interdite dans le corps. Ce n’est qu’au niveau de la sanction que l’intention du sportif est prise en compte.
Actuellement, l’AFLD est chargée de travailler sur les trois axes qui sont; la répression, le juridique et le médical. Leur politique est légitime face au dopage omniprésent dans le sport. L’agence tente d’agir concrètement pour le respect des valeurs sportives.
Cependant, certaines choses mériteraient d’être approfondies comme la formation au niveau du dopage. Il n’existe pas de réelle action de prévention pour les sportifs, et le but du Comité est de pallier ces manques. La problématique est au-delà de la loi, el faut être sur le terrain pour se rendre compte de certaines réalités. Beaucoup de sportifs se dopent sans en avoir connaissance. Certains prennent des produits contaminés sans le savoir et d’autres prennent des médicaments prescrits par leur médecin traitant. Ces derniers ne sont naturellement pas au courant de la liste de substances interdites dans le sport puisque ce n’est pas leur rôle, et le site même de l’AFLD n’est pas à jour. Il est donc difficile pour un sportif de se tenir au courant de la liste. D’autant plus que ce sera le sportif qui sera sanctionné et non le médecin qui aura prodigué un mauvais conseil.
Le Comité met donc en place des formations (d’une durée de 3 jours) pour les sportifs et les entraineurs afin qu’ils puissent anticiper. Ils ont besoin d’un processus concret pour ne pas être contrôlé positif alors que, pour certains, ils n’avaient aucune volonté de se doper. De plus, la suspension du sportif peut avoir un fort impact sur son image. Les formations servent également à prévenir les sportifs des potentielles conséquences que leur suspension pourrait engendrer.
La mixité au centre des problématiques sportives
Dès l’origine du sport, les femmes ont été mises à l’écart. Que ce soit durant les Jeux Olympiques (JO) des temps anciens ou les Jeux Olympiques modernes de Pierre de Coubertin. Selon lui, « les JO doivent être réservés aux hommes, le rôle des femmes devrait être avant tout de couronner les vainqueurs ». Il a fallu attendre 1912, les Jeux Olympiques de Stockholm, pour voir les femmes entrer sur la scène olympique. Cependant, même après leur entrée sur la scène sportive, le sport reste un phénomène genré. Le sexisme dans le sport existe depuis bien trop longtemps et cela prendra des années avant que ce ne soit plus le cas. Le comité Éthique et Sport est là pour mener ce combat et soutenir les sportives tout au long de leur carrière. L’ambition de celui-ci serait de rédiger une proposition de loi sur la mixité.
Il est tout de même important de noter certaines améliorations, notamment l’achat des droits télévisés pour le football féminin ou encore l’égalité de salaires dans certains pays, comme en Norvège. De plus, il ne faut pas confondre les cas de dopage naturel et les discriminations entre hommes et femmes. Le cas de Caster Semenya en est une parfaite illustration. C’est une athlète sud-africaine spécialiste du 800m, médaillée d’or aux Jeux Olympiques de Rio en 2016 et championne du monde en 2009 et 2017. Elle présente une hyperandrogénie, c’est-à-dire une production excessive d’hormones androgènes, notamment la testostérone. Elle se situerait donc biologiquement entre les « deux catégories sexuelles » hommes et femmes. Du fait de son corps atypique, elle a été pointée du doigt. En effet, selon l’opinion publique, il existe un manque d’équité sur la ligne de départ dû à son taux de testostérone, qui lui procure un avantage non négligeable pour continuer à courir dans la catégorie femme selon l’IAAF (International Association of Athletics Federations). Elle n’est pas la seule sportive dans ce cas-là et selon Véronique LEBAR, il s’agirait de dopage naturel et non intentionnel.
Après un premier rappel, l’IAAF a publié en 2018 un nouveau règlement concernant la qualification dans la catégorie féminine, qui précise que la femme présentant un DSD (différence du développement sexuel) doit « maintenir son taux de testostérone sanguine en-dessous de cinq (5) nmol/L en permanence (qu’elle soit ou non en compétition) aussi longtemps qu’elle souhaite pouvoir se qualifier pour participer aux Épreuves visées de Compétitions internationales dans la catégorie feminine » (Article 2.3) La nouvelle réglementation de l’IAAF serait donc conforme d’un point de vue médical, mais pose quand même certains problèmes éthiques.
Le problème majeur de la maltraitance au sein du milieu sportif
Le Comité Éthique et Sport a créé « un réseau de lutte contre les maltraitances, en accompagnant les victimes par le biais de conseils, d’actions et d’accompagnements concrets et individuels par les professionnels (avocats, médecins, psychologues, gendarmes) tous spécialisés en maltraitance ». La maltraitance dans le sport est un phénomène réel et inévitable. Elle est synonyme de mauvais traitement et peut se définir de plusieurs manières. Il peut s’agir de violences psychologiques, physiques, d’actes d’ordre sexuel ou encore de la négligence. Cette maltraitance existe dans tous les sports et à tout âge. Cependant, les sportifs restent souvent silencieux de peur que leur prise de parole mette fin à leur carrière. Une étude en France datant de 2009 montre que très peu de victimes de harcèlement dans leur sport portent plainte. Pour un sportif, il semble normal d’intérioriser la souffrance pour continuer à faire de bonnes performances. L’envie de poursuivre sa carrière professionnelle prend le dessus face au bien-être. Cependant, il est très important de ne pas rester seul et d’en parler. C’est pourquoi le Comité propose un réseau constitué de psychologues, d’avocats, d’assistantes sociales, de gendarmes, de médecins, de psychologues et d’avocats.
Tant que la gouvernance du sport ne changera pas de manière fondamentale, les mêmes problèmes se retrouveront toujours. Tous les organismes sportifs devraient donc mettre en place des politiques officielles pour protéger les athlètes. Il faudrait des instances indépendantes, à la place des cellules éthiques faisant partie intégrante des fédérations. Même si dans les faits, certaines existent, elles ne sont présentes qu’en surface et dans le fond les problèmes restent les mêmes.
Une véritable avancée est nécessaire dans le monde du sport concernant ce domaine et il faut y travailler. Les sportifs ne doivent plus se cacher derrière leur souffrance.
Un sponsoring inclusif primordial
Quant au rôle du pôle sponsoring responsable, son but est de proposer un nouveau visage des sponsors français en redéfinissant le contrat entre les sponsors et les organisations sportives. Il faudrait enrichir leur relation au-delà des aspects financiers. Les sponsors doivent être plus inclusifs en participant plus à la vie de l’équipe qu’ils sponsorisent.
Actuellement, le sponsor ne s’investit pas outre sa relation financière avec le sportif. Il arrête de sponsoriser dès que survient un scandale médiatique, comme un sportif dopé ou une manipulation des compétitions sportives. La perte d’argent sera trop conséquente pour le sponsor qui, la plupart du temps, décidera de mettre fin au contrat. L’affaire de Tiger Woods est éloquente. Il est l’un des meilleurs joueurs de Golf de tous les temps. Il a été vainqueur à plusieurs reprises du Masters, de l’Open américain, de l’Open Britannique ainsi que de l’US PGA. Les sponsors se battaient pour pouvoir profiter de son image. Cependant, après un scandale médiatique dû à son adultère, les sponsors ont de suite voulu rompre tout contact avec le sportif. Du jour au lendemain, son image a perdu de la valeur et ses sponsors ne l’ont pas soutenu.
C’est pourquoi une vraie formation est nécessaire au sein de l’équipe afin d’accompagner le sportif tout au long de sa carrière, notamment lorsqu’il commet certains écarts. Le sponsoring doit faire de la vraie pédagogie.
2 commentaires
Bonjour, pouvez me renseigner sur la démarche à suivre pour installer un bureau Comité et Ethique du Sport au sein d’un club des Sports ?
Je travaille sur une proposition de création d’un bureau Préparation Mentale et souhaiterais y adjoindre votre Comité si cela est possible. Merci
Vous pouvez me joindre au 0781527447
Marc Carrère
Professeur Eps Certifié
Enseignant Ufr Staps DU PM
Bonjour,
C’est une très belle initiative ! Notre article n’a vocation qu’à présenter le travail du Comité Ethique et Sport, nous n’en sommes pas l’intermédiaire, mais vous pouvez contacter l’association via leur site internet (http://www.ethiqueetsport.com/contact/) ou par téléphone (Véronique Lebar au 06 14 42 01 74).