Le PSG sous Tuchel (2020)
Un an et demi après son arrivée sur le banc du PSG, les avis sur Thomas Tuchel sont partagés. Certains louent certains de ses choix tactiques et ses résultats prometteurs entrevus en poules de Ligue des Champions quand d’autres regrettent un manque de continuité tactique et une relation distendue avec son groupe. En 2020, l’entraineur parisien n’a déjà plus le droit à l’erreur. Sacré champion suite à la décision du gouvernement de mettre un terme aux compétitions sportives en raison de la crise sanitaire, le PSG avance à l’aveugle concernant ses échéances européennes. Mais certains enseignements sur le coaching de l’allemand peuvent être tirés, notamment depuis la double confrontation contre Dortmund où il a joué dangereusement avec le feu.
Partie II : enfin la bonne année ? (2020)
Un début d’année médiocre marqué par le retour des blessures
Fin 2019, Tuchel avait tranché sur son schéma de jeu ou plutôt sur son animation comme il préfère l’appeler. Mais définir son schéma tactique ne résout pas tous les problèmes et le début d’année 2020 est marqué par de nombreuses absences majeures comme celles de Neymar, Thiago Silva, Marquinhos, Gueye ou encore Bernat. Ces absences obligent de nouveau Tuchel à effectuer plusieurs rotations d’un match à l’autre et ne permettent pas de travailler les automatismes en vue du sprint final. De plus, elles retardent la préparation physique de ces cadres pour les échéances importantes. De ce fait, la tension monte au Camp des loges alors que la double-confrontation contre Dortmund approche.
D’autant que Tuchel sort du placard Edinson Cavani, remplaçant depuis le début de la saison, alors que Mauro Icardi donnait pleinement satisfaction depuis le début de saison. 2020 commence donc dans la confusion et cela se ressent dans le jeu de Paris qui balbutie de matchs en matchs. Et même quand le score est flatteur comme contre Montpellier (5-0), Mbappé montre son mécontentement lors de son remplacement. Cette colère soudaine n’est pas anodine et montre que Tuchel n’a plus totalement l’adhésion de son groupe même si le comportement de l’ancien monégasque est exagéré.
Les matchs sont indigestes et seules les fulgurances individuelles permettent au club de la capitale de s’en sortir. A l’image de Neymar, trop de joueurs sont hors de forme à cause du manque de rythme. Les automatismes ne sont plus là et le match-test contre Lyon ne rassure pas, tout comme les déclarations de Neymar, préservé contre son gré.
Trahison, incompréhension, incohérence : l’échec probant de Tuchel à Dortmund
La prestation du match aller contre le club allemand n’a donc rien de surprenante avec au bout une défaite 2-1. En football, la responsabilité d’une défaite est souvent partagée entre les choix tactiques de l’entraineur et la performance des joueurs mais la défaite à Dortmund porte clairement l’empreinte de Thomas Tuchel.
Connu pour sa flexibilité tactique, le coach allemand n’a pas failli à sa réputation en alignant d’entrée un 3-4-3 sans buteur de métier. Il est important de distinguer la volonté de faire évoluer dans plusieurs schémas tactiques son équipe et savoir maitriser ces schémas. Changer de configuration tactique est cohérent lorsque chaque schéma est assimilé par tous les joueurs. Mais le 3-4-3 proposé par Tuchel n’a jamais été travaillé en amont. Le seul argument du coach allemand était de calquer le modèle de jeu de Dortmund pour contrecarrer la montées de ses latéraux. Ajouter à cela la déficience physique des parisiens, il était donc certain que les joueurs parisiens allaient être perdu sur le terrain. A l’instar du 3-5-2 de Laurent Blanc contre City en 2016, les choix de l’entraineur ont eu raison des prestations individuelles et collectives parisiennes.
Au bord du précipice, le retour à la raison de Tuchel
Les tensions, déjà présentes avant le match, ne diminuèrent donc pas avant le match retour.
Les matchs contre Bordeaux, Dijon et Lyon ne sont pas pleinement convaincants malgré une efficacité offensive certaine. Le contexte du Coronavirus vient ajouter un climat flou avec la présence ou non des supporters. Paris est décidément maudit et se retrouve au bord du précipice. Pourtant, sous l’impulsion de Neymar, le match retour des parisiens est parfaitement maitrisé même si ce ne fut pas grandiose. Au coup d’envoi, Tuchel revient à une animation plus classique avec un 4-4-2 en phase défensive et le repli de Neymar et Di Maria et en 4-2-3-1 en phase offensive avec Neymar en meneur de jeu. On peut saluer son retour à la raison même si une fois encore la blessure de Thiago Silva, la suspension de Verratti et la maladie de Mbappé ont influencé ses choix.
Dans un Parc des Princes vide mais soutenu par des supporters massés à l’extérieur du stade, les joueurs parisiens vont contrôler la partie de bout en bout avec des attaques placées réfléchies. Face à un Dortmund attentiste jouant le contre, Paris frappe par deux fois en première mi-temps avec notamment un but de la tête et de l’ancien honni Neymar Jr. Même s’il était loin d’être à 100%, le brésilien a mené son équipe vers la victoire par sa qualité de jeu hors normes et son attitude de leader. Tuchel peut encore une fois le remercier car sans ses deux buts opportunistes, la tâche aurait été grandement plus difficile. Le match retour contre Dortmund fut le dernier match du PSG avant l’interruption des compétitions en raison de la crise sanitaire. La tactique suicidaire de l’allemand au match aller aurait pu perturber grandement les ambitions parisiennes. Il aurait été remercié, Neymar et Mbappé se seraient montrés impatients face à la stagnation voire régression du projet parisien et un nouveau cycle aurait une nouvelle fois été entamé à Paris après les échecs Laurent Blanc et Unai Emery. La responsabilité n’est pas exclusive à l’homme sur le banc mais l’importance de ses décisions peut changer à jamais l’histoire d’un club dans un sens comme un autre. Paris dispose avec Tuchel, d’un entraineur avec le potentiel de voir plus grand mais il est l’heure pour son entraineur de faire preuve de plus de pragmatisme à l’aube du sprint final.
Une fin de saison inédite pour des ambitions historiques ?
Cette pause doit ainsi permettre à Thomas Tuchel de clarifier ses choix tactiques afin de préparer les échéances à court terme. D’abord sur le schéma de jeu puis sur la hiérarchie entre ses joueurs. Cela permettra de travailler dans la continuité et la sérénité même si certains de ses choix ne seront donc pas sans conséquences sur le futur du PSG. Ne pas faire jouer une seule minute Mauro Icardi lors des 8ème de finale alors que l’argentin s’est toujours montré à son avantage dans les grands matchs a surement frustré et fait cogiter le joueur prêté par l’Inter. Même si Paris a le dernier mot sur ce dossier pour lever ou non l’option d’achat, une relation tendue entre l’entraineur et son buteur ne doit pas nuire aux intérêts parisiens.
Cette fin de saison inédite sera donc un nouveau tournant pour le projet QSI. Si Paris répond présent en 1/4 de finale une dynamique positive peut enfin être lancée. En revanche, si tout s’écroule de nouveau, une fin de cycle déjà annoncée débutera. Seules les conséquences économiques de la pandémie pourront freiner les ambitions des clubs désireux de s’attacher les services des stars parisiennes. Mais elles pourraient également freiner dans le sens inverse une possible prolongation de Neymar et/ou Mbappé qui semble une priorité, eux dont les contrats expirent en 2022. Les recrutements de latéraux et d’un remplaçant à Cavani pourront aussi être perturbés.
Quant à Tuchel, son avenir demeure flou et un accès au dernier carré de la LDC ne lui assurerait pas forcément une troisième année dans la capitale. L’ombre d’Allegri, désiré de longue date par Leonardo, plane toujours du coté du Parc des Princes. Encore une fois, les luttes d’intérêts ne seront pas sans conséquences à Paris.
Melvil Chirouze ( @iamxmelvil )