La marchandisation de l’image du sportif
Beaucoup l’ignorent mais si les sportifs de haut niveau, notamment les footballeurs tels que Cristiano Ronaldo ou Neymar, gagnent autant d’argent, ils ne la doivent pas uniquement à leurs prestations sur le terrain. En effet, chaque sportif possède, comme tout le monde, un droit à l’image. C’est un droit exclusif que nous avons sur notre image et l’utilisation qui en est faite. Ce droit a été dégagé par la jurisprudence sur le fondement de l’article 9 du Code civil qui dispose que « Chacun a droit au respect de sa vie privée « . Une autorisation préalable est donc nécessaire pour son utilisation. Cependant, il est important de savoir son rôle en matière sportive.
Le droit à l’image, un droit varié
Il existe à ce jour trois types de droit à l’image dans le milieu sportif. Tout d’abord, le droit à l’image individuel du joueur en dehors de son club. Le joueur garde donc la maitrise sur son image et sur sa commercialisation. C’est à lui seul de décider s’il souhaite nouer des partenariats avec des sociétés ou des sponsors et recevoir une rémunération en contrepartie. Le consentement du joueur doit donc a priori être requis. Seulement, il existe un cas particulier où son consentement n’est pas nécessaire. Il s’agit du droit d’information du public.
À coté de ce droit à l’image individuel, il en existe un autre mais associé au club, c’est à dire en lien avec le club du sportif. Le club a la possibilité d’utiliser l’image du joueur à des fins promotionnelles ou pour des produits dérivés du club. Pour ce type de droit individuel entre le club et le sportif, l’avenant du contrat de travail le précise. Toutes les conditions d’utilisation de l’image du sportif seront détaillées, ce qui permettra au club de savoir à quel point il peut exploiter l’image de son sportif. Enfin, il existe un droit à l’image collective qui correspond à l’image du sportif associée à celle de son équipe. Il s’appliquera s’il y a 50% de l’effectif présent sur le terrain que cela soit durant un entraînement ou un match. Il s’agit du droit qui suscite le plus de discussions au vu de l’entrée en vigueur du décret du 3 août 2018 concernant la double prestation qui lie un sportif à son club.
Le droit à l’image, un droit exploité
Comme dit Franck Lagarde ( avocat et membre du centre de droit et d’économie du sport de Limoges ) « pour certains sportifs, les droits à l’image peuvent générer des revenus conséquents ». Cette exploitation du droit à l’image dans le milieu sportif n’existait pas dans les années 1960. Il n’a cessé de se développer avec l’évolution de la nouvelle technologie.
Cependant, il rajoute que « tous les footballeurs même en évoluant dans les championnats professionnels n’ont pas une image qui peut faire l’objet d’une exploitation commerciale. On le voit bien dans les publicités, on est sur des joueurs de très haut niveau ».
Par exemple, Cristiano Ronald, star du football international, semble profiter de ses droits à l’image. Entremise par une société offshore à laquelle il a cédé ses droits entre 2009 et 2014, il aurait touché 74,8 millions d’euros liés à ses droits d’image.
Droit à l’image et évasion fiscale
Lorsqu’ils vivent dans un pays, les sportifs doivent payer leurs impôts. Or, le droit à l’image pouvant engendrer d’énormes sommes, les joueurs sportifs ont tendance à cacher ces revenus en les déposant sur des comptes dans des pays différents pour qu’ils ne tombent pas dans les radars de l’administration fiscale.
C’est notamment le cas de Luka Modric. Selon les faits révélés par la presse espagnole, il a créé au Luxembourg une société à qui il a cédé ses droits d’image. Cela lui aurait permis de ne pas déclarer de revenu au fisc espagnol de 2012 à 2014.
Très souvent également, les clubs savent utiliser les droits à l’image de leurs joueurs pour payer moins de charges et parfois de manière illégale, comme Cristiano Ronaldo. Son agent sportif était au courant qu’il avait cédé ses droits à l’image à une société en dehors de l’Espagne. Le club l’était également selon les faits mais a préféré le cacher.
Ils sont donc en réalité 3 dans le contrat d’exploitation du droit à l’image et non deux, il y a le club, le sportif et la société. Le club peut y participer indirectement et profiter de la situation de son sportif.
Crédit : Stringer / Getty
La réponse de la loi Braillard du 1er mars 2017
Suite au développement de ce droit à l’image, la loi Braillard du 1er mars 2017 concernant l’éthique du sport et la compétitivité des clubs est entrée en vigueur, ainsi que le décret d’application de l’article 17, en août 2018. Depuis ce décret, concernant le droit à l’image collective, les clubs sportifs professionnels sont autorisés à verser une partie de la rémunération de leurs joueurs sous forme de droits à l’image et sont exonérés de cotisations patronales.
Le droit à l’image ne sera plus assujetti aux mêmes règles que le reste de leur rémunération concernant leur prestation sportive, ce qui permettra au club de réaliser une économie car ils auront moins de charges. Le joueur pourra donc recevoir une rémunération plus importante ou le club pourra faire d’autres investissements plus importants.
Est-ce que cela va permettre de réduire la tendance d’évasion fiscale ? Concernant les clubs professionnels, oui car ils pourront enfin jouer à armes égales avec la concurrence étrangère. Cependant concernant les joueurs, rien ne pourra les arrêter car la situation sera la même pour eux.