Le combat perpétuel de l’Agence Mondiale Antidopage
L’Agence mondiale antidopage, surnommée « l’AMA », est une agence qui a été créée le 10 novembre 1999 afin de lutter contre le dopage. C’est une pratique ancienne qui est apparue durant l’Antiquité en même temps que les premières compétitions sportives comme les Jeux Olympiques. Elle correspond à la prise de substances illicites de la part des sportifs de haut niveau.
Les sportifs ont toujours cherché à améliorer leurs performances. Des méthodes pharmacologiques étaient utilisées, comme par exemple le taureau pour les lanceurs ou encore la viande de chèvre pour les sauteurs. Tandis que le but des lanceurs étaient de reproduire la force des taureaux, les sauteurs avaient l’espoir de sauter plus haut que les autres.
Depuis, les enjeux économiques, financiers et idéologiques autour du dopage n’ont cessés d’évoluer. Il était donc nécessaire de trouver un moyen de lutter efficacement contre cette pratique lors des compétitions sportives. Les moyens pharmacologiques sont devenus de plus en plus ciblés et malgré la création de l’AMA qui vise à dissuader les sportifs de haut niveau de consommer des substances illégales, la tentation est encore réelle et très présente dans le sport.
La création attendue de l’AMA
Les premières tentatives de réglementation du dopage sont apparues en 1920. Au départ, les fédérations internationales comme celle d’athlétisme ont commencé par interdire le dopage durant leur compétition. Cependant, faute de test efficace, une faiblesse existait et les sportifs continuaient de se doper. Ce n’est que dans les années 1960 que les premiers tests se sont avérés utiles. Les contrôles n’ont dès lors cessé de croître et il a fallu attendre les années 1999 avant que les premières lois antidopage soient adoptées en France.
La création de l’Agence mondiale antidopage a donné suite à l’affaire Festina qui, à l’époque, a fait couler beaucoup d’encre. Cette affaire était en lien avec le fameux Tour de France de 1998. Le médecin de l’équipe Festina a été controlé par la douane française qui aurait découvert dans sa voiture plus de quatre cents flacons de produits dopants et stupéfiants, 120 capsules d’amphétamines et d’autres produits relatifs au dopage. Face à une telle évidence, plusieurs personnes de l’équipe ont fini par avouer l’existence d’un dopage organisé au sein de l’équipe. Des coureurs comme Christophe Moreau ou encore Laurent Brochard ont rapidement été accusés d’avoir pris des substances pour améliorer leurs performances.
Jean-Marie Leblanc, le directeur du Tour, a donc décidé d’exclure Festina de la compétition pour « manquement à l’éthique ». Décision contestée par les coureurs mais qui se révèlera justifiée après des contrôles positifs au dopage.
Le dopage ne pouvait plus être toléré au sein des compétitions sportives. Cela allait à l’encontre des valeurs que devait prôner un sportif de haut niveau comme le respect envers les autres concurrents et l’éthique. L’AMA est ainsi apparue peu de temps après cette affaire, dans un contexte de nécessité absolue et a même créé le Code mondial anti dopage afin d’asseoir son autorité.
Un dopage encore trop présent malgré l’impact positif de sa création
Malgré la création de cette agence et l’impact positif qu’elle a eu sur l’ensemble du mouvement sportif, le dopage reste très présent. La majorité des sports est concernée et les techniques de dopage sont de plus en plus sophistiquées. Les joueurs apprennent à éviter les contrôles de manière subtile afin de ne pas être exclus de la compétition sportive qui les attend.
Le protocole concernant les contrôles n’est pas le même en fonction des sports et des pays. Pour certains, les dates de contrôle de dopage sont données à l’avance, ce qui rend bien évidemment cet acte très facile à dissimuler. L’oscar sera attribué au sportif qui effectuera la crise de panique la plus vraisemblable afin de se soustraire au contrôle antidopage.
Sans grande surprise, le cyclisme est le sport le plus touché par le dopage. L’athlétisme se positionne juste derrière et les athlètes contrôlés positifs sont essentiellement Jamaïcains et Américains. Ces deux pays dominent le monde athlétique depuis des années et veulent donc préserver leur notoriété. Le dopage, représente beaucoup pour les États. Tandis que la Chine durant des années, a utilisé les Jeux Olympiques pour montrer sa prédominance culturelle et politique face aux États-Unis, la Jamaïque a tenu à montrer sa place sportive dans le monde, notamment grâce à Usain Bolt.
L’envie d’affirmer sa supériorité pour un pays à travers le sport pousse les sportifs à prendre des produits illégaux afin d’être le meilleur. C’est pourquoi la lutte contre le dopage est constamment en évolution. Les contrôles doivent se montrer efficaces et doivent continuer de dissuader la majorité des sportifs de haut niveau à prendre ces substances.
Des intérêts à prendre en considération avec les droits de la personnalité du sportif
Néanmoins, il ne faut pas oublier les droits de la personnalité du sportif qui sont à prendre en considération lorsque l’on sanctionne un sportif ayant été controlé positif au dopage. Les contrôles antidopage peuvent être effectués en tout temps, en tout lieu et à toute heure. Quant au sportif, il bénéficie, comme chaque individu, de l’inviolabilité du domicile et de la protection qui s’y attache. C’est pourquoi il est important de vérifier si les atteintes qui lui sont portées s’accompagnent de garanties suffisantes. L’atteinte à sa réputation entre également en jeu lors de sa suspension. Pour les besoins de la lutte contre ce fléau, il existe un grand risque de s’en prendre aux libertés individuelles.
Il est donc nécessaire, selon l’ordonnance du Code mondial antidopage, « d’assurer une stricte proportionnalité entre les atteintes portées aux droits du sportif et les enjeux de la lutte contre le dopage ». Cette proportionnalité s’appliquera à chaque cas selon les circonstances.
Le Tribunal arbitral du sport a tout de même décidé à plusieurs reprises, notamment dans l’arrêt Guerrero du 30 juillet 2018, de faire primer les intérêts de l’AMA face au sportif, et semble alors prendre le dessus sur les intérêts du sportif. Dans cette affaire, un joueur de football péruvien a été suspendu après avoir effectué un contrôle suite à un match face à l’Argentine lors de la Coupe du Monde de la Fifa en 2018. Il a été contrôlé positif mais a voulu faire appel au Tribunal arbitral du sport (TAS) en avançant que le contrôle n’avait pas respecté ses droits de la personnalité. En effet, la sanction alléguée par le TAS ruine sa réputation en l’empêchant de dégager un certain revenu en exerçant son métier. Cependant, le TAS a confirmé cette suspension. L’atteinte à la réputation d’un sportif de haut niveau durant sa suspension n’est pas suffisante pour retenir une atteinte à sa personnalité.
Le Conseil d’État en France a également validé la suspension provisoire de 4 ans de Clémence Calvin, une cycliste française. Selon sa version des faits, elle aurait été contrôlée devant une boulangerie et sous la pression des contrôleurs, aurait fait tomber son enfant par terre alors qu’elle le tenait dans les bras. Cependant, cela n’aurait pas suffit pour faire primer son intérêt personnel. Le Conseil d’Etat relève en effet que les contrôleurs se sont présentés et qu’elle était à l’approche d’une compétition sportive. Elle n’était pas à l’endroit qu’elle avait indiqué et ne pouvait pas être étonnée lorsque les contrôleurs l’ont trouvée. L’intérêt de l’AMA, qui est de préserver l’intégrité des sportifs, a donc primé face à une potentielle atteinte à sa personnalité.
Ainsi, malgré les innovations, notamment juridiques, le dopage reste un fléau dans le monde du sport. S’il apparaît qu’il existera toujours des sportifs essayant de prendre des substances illicites en vue d’être le meilleur, l’AMA se voit incomber la lourde charge de continuer sans cesse d’innover afin de limiter le plus possible de telles pratiques.