Bilan du septennat parisien en Ligue des Champions
Malédiction ou plafond de verre?
En 1974, lors de la première finale de la Coupe des clubs champions (aujourd’hui Ligue des Champions) que disputait l’Atletico Madrid, celui-ci avait été rejoint au score par le Bayern Munich dans les derniers instants de la prolongation, et de fait contraint à rejouer la rencontre, perdue 4-0 par les Colchoneros, offrant à son légendaire Président Vicente Calderon une saillie depuis passée à la postérité: « Nous sommes le Maudit Football Club ». S’il ne savait pas alors à quel point il disait vrai au regard de l’histoire récente de son équipe, battue notamment deux fois en trois ans, et de manière cruelle, par son voisin merengue en finale de la compétition reine des clubs, l’Atletico a su gagner ses galons de grand d’Europe et a eu l’occasion de remporter des trophées continentaux (coucou les Marseillais) et, surtout, de rejouer des matchs de cette importance.
Ce qui n’est pas le cas du Paris-Saint-Germain dont les fans plus ou moins récents se damneraient volontiers pour aller si loin dans les compétitions européennes. En effet, depuis la prise de contrôle du club par le Qatar en 2011, et la première campagne de ligue des champions en 2012, le club n’a jamais su aller plus loin que les quarts de finale. Pire, ces 3 dernières saisons, il a pris la porte dès les huitièmes, marquant, au moins du point de vue du seul résultat , une régression.
Le constat est le suivant, Paris n’y arrive pas. Une fois cela dit, et une suze partagée avec Gérard, il convient de se demander si ces éliminations ont autre chose en commun que la détresse profonde dans laquelle elles ont laissé les supporters parisiens dont l’auteur de ces lignes.
Si cela fait désormais sept éliminations dans la phase finale, il serait facile et rafraichissant de s’amuser à les ranger dans diverses catégories.
Les cas où l’adversaire était trop fort
Finalement, et en essayant de se départir de la subjectivité exacerbée qui caractérise tout supporter, les éliminations du PSG ne tenant qu’à la supériorité de l’équipe adverse ne sont pas si nombreuses.
Il y a ce quart inaugural de 2013 lors duquel les Rouge et Bleu arrachent le nul à domicile sur un but hors-jeu de Zlatan et une frappe déviée de Matuidi, le PSG se permettant même de faire frissonner le Camp Nou au retour lorsque Pastore ouvrira le score avant de claquer des dents à son tour en voyant un Messi diminué retirer son survêtement et être décisif quelques minutes après son entrée en jeu.
Deux ans plus tard, de nouveau contre le Barça, Paris se fera rouler dessus par une machine de guerre portée par une MSN irrésistible, avec un doublé de Neymar au retour et des gourmandises de Suarez à l’aller, bien secondé par David Luiz, dont les supporters franciliens se rappèleront surtout pour ses difficultés motrices au niveau des membres inférieures.
De manière moins évidente pour certains, en raison de la forme supposée des deux équipes au moment du tirage au sort, l’élimination face au Real Madrid l’an dernier en huitièmes de finale face à une équipe partie dérocher sa troisième LdC de suite et la quatrième en cinq ans est assez logique, et ce malgré le non-match au retour des Parisiens, certes privés de Neymar.
Les cas où Paris aurait pu passer
Gâcher un avantage de deux buts obtenu au match aller? Le PSG n’en est pas à son coup d’essai puisqu’en 2014, c’est après une victoire 3-1 glanée sur ses terres face à Chelsea qu’il s’inclinera dans l’antre des Blues, une fois de plus crucifié dans les derniers instants par l’un de ses supporters en la personne de Demba Ba, natif des Hauts-de-Seine.
Toutefois, l’ampleur du score de l’aller, boursouflée par un exploit de Pastore dans le temps additionnel, ne devait pas fair oublier les occasions des Blues, et le crève-coeur que fut le but du Sénégalais à Stamford Bridge sonnait comme un juste retour des choses.
Deux ans plus tard, ce n’est plus la même chose, le PSG a éliminé deux fois Chelsea de suite en huitièmes de finale, la seconde en faisant montre d’une supériorité indiscutable, et pense en avoir fini avec ses démons. Se dresse sur la route de l’Eden des demies, le Manchester City en fin de cycle de Pellegrini dont le remplacement par Guardiola est déjà prévu. S’il doit avoir des regrets, c’est principalement pour son match aller lors duquel le PSG ne fait mieux que match nul avec de nombreuses occasions manquées (coucou Zlatan) avant d’aller perdre à Manchester dans un révolutionnaire 3-5-2 , qui vaudra à Laurent Blanc d’espérer entrainer les plus grands clubs européens, mais surtout de très belles indemnités.
Les cas où Paris aurait dû passer
Le football est tout sauf méritoire, et certaines de ses « injustices » les plus célèbres ont fait son Histoire et contribué au fait qu’il soit le sport le plus populaire, parce que le plus humain (coucou les Rugbymen). Ces belles paroles, que n’auraient pas reniées un de mes amis qui est robinet d’eau tiède à mi-temps, prononcées, la mise en pratique est tout autre. En 2017, le PSG détruit le Barça au match aller, Kimpembe se révèle au monde en éteignant à lui seul Messi et Suarez et Di Maria est céleste. A ce moment-là, en match aller-retour, aucune équipe s’étant imposée à l’aller sur un score aussi large, 4-0, ne s’est fait éliminer. Aucun commentaire ne sera ajouté sur le match retour, tout ayant déjà été dit et plus d’une fois. Mais se faire éliminer après l’avoir emporté à l’aller avec un tel écart et avec la manière est une faute professionnelle et une tache indélébile dans l’histoire du club. L’élimination subie la semaine dernière à l’issue d’une défaite à domicile contre un Manchester United, loin d’être un grand cru, privé de plusieurs titulaire dont son meilleur joueur suspendu, et arrivant au Parc de Princes avec un handicap de deux buts à remonter est évidemment à ranger dans cette catégorie… sans pour autant parvenir à l’expliquer. Vous avez dit malédiction?
Pléthore de causes ?
C’est un fait donc, Paris n’y arrive pas. Hormis le Real des années 2000, éliminé en huitièmes de finale six fois consécutivement, rarement une équipe aussi attendue et supposément aussi talentueuse aura autant plafonné. Mais malgré les catégories pré-citées, une élimination reste une élimination et pour citer un grand philosophe « il n’y a pas de défaite encourageante ». Chaque année ou presque, Paris semble avoir les armes pour viser haut et chaque année, les espoirs placés en lui viennent se fracasser contre la réalité du haut niveau. Car là est la question, à qui la faute?
- À l’arbitrage diront certains, le souvenir encore brûlant de ces possibles penaltys refusés au club de la capitale contre Barcelone lors de la Remontada, ou de celui concédé, non sans polémique, par « Maestro » Kimpembe ce mercredi soir.
- À l’entraineur s’écrieront d’autres, pointant les choix de système de Blanc, ou d’hommes, d’Emery comme de son prédécesseur.
- Aux joueurs et à leur mental, évidemment, certains ayant contribué sinon participé à la plupart de ces désillusions et en étant si profondément marqués mentalement qu’il semble rationnel de se demander s’ils sont seulement capable de surmonter ce passif… Tout en notant, clin d’oeil du destin, que les deux joueurs offrant des buts aux Mancuniens ce 6 mars n’étaient pas au club les années précédentes.
- À la faiblesse de la Ligue 1 argueront les observateurs, que le PSG survole et jugée trop peu relevée pour préparer les hommes de Tuchel aux grands matchs européens.
- À la malchance, avanceront les superstitieux comme les désabusés, devant l’indisponibilité deux années consécutives du meilleur joueur du club dans le money time, et au vu du match de mercredi soir voyant Manchester marquer sur des erreurs parisiennes ou des décisions arbitrales sans être dangereux par ailleurs, on aura du mal à les contredire.
Des maux institutionnalisés
Cependant, s’il est évident que le PSG n’a pas toujours été aidé par le destin, les arbitres, son propre championnat national, ou même par le tirage au sort, la cause semble plus grave car endogène, et même inhérente au fonctionnement actuel du club.
Les passe-droits laissés à certains joueurs, ou la complaisance à leur égard en matière d’hygiène de vie, la propension du club à régulièrement s’agenouiller devant un joueur de peur que celui-ci ne parte , en le prolongeant grassement ou en laissant sa sélection nationale décider du traitement médical adéquat quand c’est pourtant bien le club qui rémunère le joueur (et non la Sécu, voir Gérard #1 Neymar) la gestion du cas Rabiot ou encore le mercato lors duquel ferraillent l’entraineur et le directeur sportif pour imposer leur vision plutôt que d’agir de concert et lors duquel le club surpaie des joueurs de seconde classe sont autant de raisons invisibles qui, ajoutées aux précédentes, contribuent à expliquer le plafonnement du PSG à ce stade de la compétition et l’empêchent de se mêler aux prétendants à la victoire finale, ou au moins de nous dispenser de l’humiliation subie mercredi soir.
Tuchel sinon rien
Toutefois, les choses changent. Un entraineur compétent est aujourd’hui aux commandes, qui en plus d’apporter une plue-value tactique indéniable, élargissant les options du PSG, et masquant les manques de son effectif, n’hésite pas à mettre au pas les fortes tête et à faire respecter l’institution qu’est le club, le tout en ayant gagné, et gardé l, respect, voir l’amour, de son groupe. Sous sa houlette, le PSG est sorti d’une poule relevée dans laquelle il était qui plus es mal embarqué, et continue, exception faite d’une élimination rocambolesque -encore une- en coupe face à Guingamp, sa sinécure sur la scène nationale. L’Allemand a par ailleurs marqué son territoire en affrontant en privé, et joutant en public avec le directeur sportif Antero Henrique, rendant leur collaboration sur le long terme improbable. Cet été, le club devra faire un choix. Qu’il choisisse bien.
Si Lampedusa écrivait qu’il faut « que tout change pour que rien ne change », on serait tenté de prendre le contrepied et ainsi d’écrire qu’il faut que pour que Thomas Tuchel reste en place pour que les choses continuent de changer au Paris-Saint-Germain. L’élimination contre Manchester pourrait alors être perçue comme une erreur de parcours dans ce nouveau voyage, ou une résurgence des erreurs passées plutôt qu’une énième sortie de piste d’un club qui tourne en rond. Mais à Paris, il y a souvent plus de questions que de réponses.
- Tuchel résistera-t-il à cet échec?
- Neymar et Mbappé seront-ils de nouveaux associés en compétition européenne au PSG?
- Comment le club abordera-t-il le prochain mercato censé restructurer et renouveler un effectif déséquilibré et incomplet?
- Quelle latitude sera laissée au club pour recruter par l’opaque Fair-Play financier ?
La qualité des réponses à ces questions sera appréciée à partir de mars prochain, car pour Paris, plus que jamais, seule l’Europe compte.