Un match historique, un match symbolique
Pendant des années le système solaire a tourné autour d’un astre, celui du soleil madrilène. Mais autour du système Solari, personne ne souhaite graviter.
Madrid était comme cet ami que l’on a tous. Il ne vient pas aux CMs, vient de manière épisodique aux TDs, ne semble pas réviser mais décroche son semestre avec mention. Le point commun entre cet ami et la Casa Blanca était l’expression « j’y vais au talent ».
Mais ce temps est révolu, le soleil madrilène s’est éteint hier, au terme d’une partie historique et cette chute fut accompagnée par la clameur des 4200 supporters Bataves présents hier au Bernabéu.
Il faut maintenant analyser ce match dans une perspective symbolique et historique.
Au terme de la guerre de Quatre-Vingts Ans (1568- 1648), les Provinces-Unies se détachent des Pays-Bas espagnols et gagnent leur indépendance.
Cette guerre met fin aux ambitions territoriales de l’Espagne dans le nord de l’Europe. Le 6 mars 2019, l’Ajax écrase Madrid, mettant fin à leurs ambitions en Ligue Des Champions.
Dans l’Histoire, à chaque Espagnol ambitieux répond un Batave défenseur de ses valeurs.
Mais quelles ont été les valeurs défendues lors du match ?
Ce sont celles du football total, un football dans lequel l’attaque est de mise, les postes ne sont pas totalement hermétiques et où la totalité de l’effectif est impliquée dans chaque phase de jeu, qu’elle soit offensive ou défensive.
En réalité, ce parcours pour l’instant remarquable pour l’Ajax est assez symptomatique de cette petite renaissance que vit actuellement le championnat des Pays-Bas.
Les équipes y bénéficient de joueurs en prêt en provenance des plus grands clubs. Les cadors européens sont toujours convaincus que ce championnat permet l’éclosion des futures pépites qui marqueront les esprits. Au Vitesse Arnhem ce ne sont pas moins de quatre joueurs de Chelsea qui évoluent temporairement sous les couleurs noire et jaune. La politique actuelle des grandes institutions est de placer une équipe d’un championnat moins huppé dans son satellite. Ce statut de satellite permet des arrangements sur le marché des transferts ainsi qu’une préférence concernant la politique de prêt.
Le pays est également connu pour former les grands de demain. L’Ajax, du Feyenoord ou encore le PSV Eindhoven n’ont plus à prouver qu’ils font partie des meilleurs centres de formation européens.
Enfin, les moyens réduits des différents clubs obligent les cellules de recrutement à travailler dur pour attirer des talents. En réalité, dans le monde du football actuel, un constat s’impose : les clubs qui ont des moyens réduits font de meilleurs transferts que les grands cadors. Parlons de la ligue 1. Toute proportion gardée, les meilleures cellules de recrutement ne sont pas à Paris ni à Marseille mais bien à Strasbourg, Reims ou encore Saint Etienne. Ce schéma se reproduit sur la scène européenne et on le constate pour l’Ajax. Cette année, la cellule de recrutement de l’Ajax n’a commis aucune erreur. Tadić, Neres ou encore Tagliafico. Tant de joueurs qui font grandir l’équipe, dénichés à moindre frais par la cellule de recrutement.
Ces différents éléments conduiront certainement à replacer le championnat néerlandais au cœur du jeu européen. Le Football, tout comme l’Histoire, est fait de cycles. Des périodes ont été dominées par l’Ajax, peut-être sommes-nous à l’aube d’une nouvelle domination Batave. Une seule certitude : le cycle madrilène, lui, s’est bien achevé hier.
Hier soir, le football populaire a triomphé. Cette jeunesse rouge et blanche a renversé cette aristocratie bien pâle.
Mais des paradoxes se dessinent. Cette jeunesse, celle qui renverse l’ogre aujourd’hui va être amenée à le nourrir demain. De nombreux joueurs de l’Ajax sont en effet proches d’un transfert dans les plus grands clubs européens…parfois même à Madrid ! Le bourreau d’un soir qui fait rêver l’Europe risque de se transformer en sauveur d’un club à la déroute demain. Dans le football moderne il faut avoir les moyens de ses ambitions.
C’est ici la preuve que le football populaire ne peut pas triompher, il est contraint à l’exploit. L’argent triomphera, il permet même de racheter une défaite et des ambitions.
Si ce constat vous désole, demandez à Fiorentino Pérez quelques billets, afin de sécher vos larmes.