Un nouvel Accor pour le Paris Saint-Germain
All-in pour le club de la capitale, sur fond de concurrence économique et sportive
Après treize ans de collaboration avec Fly Emirates, le club de la capitale a officialisé hier son nouveau partenariat avec le groupe hôtelier Accor, et plus précisément avec sa marque « lifestyle » « ALL » signifiant « Accor Live Limitless ». Outre sa présence sur le maillot du club de la capitale, ALL obtient également par ce contrat le naming de l’espace réceptif Skybar du Parc des Princes ou encore le naming des tournées estivales.
Un contrat lucratif pour les deux co-contractants
Le PSG et le groupe hôtelier ont tenu une conférence de presse vendredi dernier au Parc des Princes, afin d’officialiser le partenariat. Si le contrat présente des éléments qui sont et demeureront probablement ignorés par les profanes, sa durée est d’ores et déjà connue. Il s’agit en effet d’un partenariat de trois ans renouvelables pour une même durée, et ce contrat apparaît bénéfique pour les deux parties. En effet, à l’instar des propos récent de Jean-Claude Blanc, le Paris Saint-Germain souhaite désormais limiter son nombre de partenaires dans le but d’offrir une visibilité sans commune mesure à chacun d’entre eux, et miser sur l’image exceptionnelle que renvoie la ville de Paris dans le monde. Ce contrat semble par conséquent satisfaire les deux parties qui jouiront de fait de leurs forces et qualités respectives.
D’une part, Accor Live Limitless devrait sans doute inclure à son offre des expériences inédites telles que la présence d’académies de football au sein de ses hôtels, ou encore l’installation temporaire de chambres au sein du Parc des Princes, à l’image de ce qui a déjà été réalisé au Matmut Atlantique de Bordeaux. Ambition assumée d’Accor : proposer des prestations d’exception autour du sport, tout en renforçant sa visibilité mondiale. Il apparaît en effet évident de préciser qu’ALL bénéficiera de la visibilité du Paris Saint-Germain à l’international, point notamment mis en exergue par Sébastien Bazin, qui a reconnu que la répartition intercontinentale des supporteurs et suiveurs du club était un point qui faisait du Paris Saint-Germain « l’une des trois plus grandes marques de sport mondial ».
D’autre part, le club des Lumières obtient un contrat très lucratif, selon les dires des initiés. Il apparaitrait que le deal porterait sur un montant compris entre 52 et 60 millions d’euros par an. Néanmoins, cette somme supposée ne demeure qu’une estimation, puisque la seule réponse apportée à ce sujet a fait sourire les journalistes présents, Sébastien Bazin se fendant d’un « ce n’est pas cher mais c’est beaucoup d’argent ». Par ailleurs, le septuple champion de France obtient du géant du tourisme sa capacité à être présent partout dans le monde, et en fait réciproquement un ambassadeur de choix pour internationaliser encore plus la marque PSG. En outre, et ce point apparaît comme majeur, le Paris Saint-Germain renforce son identité nationale en se liant à un groupe français. Il appuie ainsi, et véhicule l’idée d’une France conquérante, et permet de mettre définitivement fin à l’association entre Fly Emirates et le Qatar, dans un contexte géopolitique tendu au Moyen-Orient.
Un contrat qui fait jaser
Cet accord est donc d’une importance conséquente pour le club, dans le contexte du Fair-play financier et de sa menace planant au-dessus des têtes dirigeantes. Il lui permet, comme précisé précédemment d’empocher une manne financière (a) qui ne provient pas de près ou de loin du Qatar (b). Néanmoins, certains aspects de l’accord ont prêté à de nombreuses réactions.
Premièrement, il convient de noter que le Président Directeur-Général de l’opérateur hôtelier Accor, Sébastien Bazin, n’est ni plus ni moins que l’ex-président du PSG lors de l’ère Colony Capital, ancien propriétaire du club. Deuxièmement, l’ombre toujours présente de Nicolas Sarkozy, proche de Nasser Al-Khelaïfi et de Sébastien Bazin – dont il avait contribué à sauver sa fille lors de la prise d’otage de Neuilly de Human Bomb –, et désormais administrateur indépendant en charge de la présidence du comité de « stratégie internationale » d’AccorHotels. Troisièmement, la nature du deuxième actionnaire d’AccorHotels, qui se révèle être le fond d’investissement étatique du Qatar, et qui détient 10,2% de son capital social. A ce titre, un avis publié par l’Autorité des marchés financiers a même relayé la déclaration selon laquelle le 13 juillet 2018, Qatar Holding, filiale du fonds souverain qatarien Qatar Investment Authority, a franchi les seuils des 10% et 15% des droits de vote. Ainsi, au 10 septembre 2018, QIA détenait respectivement de 10,14% et 15,96% du capital social et des droits de vote d’AccorHotels. La Qatar Holding avait en outre déclaré qu’elle envisagerait « des acquisitions supplémentaires d’actions Accor au vu des opportunités qui pourraient se présenter », tout en excluant de prendre le contrôle du groupe.
C’est en ce sens que certains pointent le mélange des genres, notamment du côté des « historiques », qui évoquent l’idée d’un accord surévalué, et réalisé « entre amis ». Néanmoins, Sébastien Bazin a écarté toute possibilité d’une immixtion de la part du Qatar ou de Nicolas Sarkozy, et a affirmé que « les décisions prises par le groupe Accor sont prises par les dirigeants du groupe Accor », ainsi que l’équipe dirigeante en charge du contrat « a partagé avec le conseil d’administration ce [qu’elle faisait] et ce à quoi [elle voulait] arriver avant d’informer le conseil quand la signature était faite ». Il rappelle en outre que le rôle du conseil d’administration est de nommer les dirigeants, pas de prendre les décisions à sa place. Il est toutefois clair que ces affirmations demeurent policées et politiques.
Il convient d’observer que ce genre d’accord est fréquent. L’exemple le plus frappant reste à ce jour la prolongation du contrat entre le Bayern Munich et Adidas pour une durée de 15 ans moyennant une somme qui avoisine les 900 millions d’euros, soit plus de 60 millions d’euros par an. Or, Adidas détient 8,33% du capital social du club bavarois, qui possède quant à lui 0,22% du capital social de l’équipementier. Il apparaît donc que le contrat conclu entre les deux n’est pas vraiment le fruit d’un échange entre deux groupes qui s’ignoraient jusqu’alors…
Ce type d’accord est primordial pout tout club ayant des prétentions européennes, et s’il serait présomptueux de crier à la fraude dans un cas comme dans l’autre. Ces partenariats s’inscrivent dans le cadre d’une compétition sportive et économique, où tous les moyens sont bons pour obtenir de nouveaux financements et déstabiliser les clubs adverses.